Départ de Vasco de Gama pour les Indes (Alfredo Roque Gameiro) |
VASCO DE GAMA
Vasco da Gama, le découvreur de
la route des Indes, naquit dans la petite ville de Sines, à vingt quatre lieues
de Lisbonne. Ainsi que pour Christophe Colomb, l'on ignore la date de sa
naissance.
Vue de Lisbonne |
Selon Carvalho, la famille des
Gama remontait jusqu'au treizième siècle» et si l'on s'en rapporte à
d'anciennes traditions, elle serait issue d'une branche illégitime de la maison
royale de Portugal. Au seizième siècle, Alvaro Eanes da Gama avait contribué
par son courage à la conquête des Algarves. De ce personnage était descendu Estevao
da Gama, né à Olivença, avec qui commença l'illustration de la famille. Le père
du découvreur de la route des Indes, qui
portait le même prénom que son
aïeul, Estevao, jouissait d'une haute réputation comme marin. Il s'était marié
avec dona Isabelle Sodré, et il en avait eu plusieurs enfants dont Vasco et
Paul, qu'il destina de bonne heure à la marine, où il s'était fait un nom. Tout
porte à croire que Vasco da Gama commença sa carrière dans les mers d'Afrique.
Le premier historien qui ait écrit sur les Indes, Fernand Lopez de Castanheda,
aime à rappeler qu'avant ses mémorables découvertes, Vasco da Gama avait acquis
une grande expérience de la navigation.
Sous Jean II, il avait été chargé
d'aller saisir dans les ports du royaume les navires français qui s'y
trouvaient mouillés. Cet acte de violence n'était qu'un mode de représailles
qui se justifiait par la prise d'un vaisseau portugais, revenant d'Elmina,
chargé d'or, que des corsaires français avaient capturé en pleine paix. La
restitution du bâtiment ayant été ordonnée par Charles VIII, Vasco da Gama
n'eut pas à prolonger la lutte. Sans rien préciser, mais, selon toutes
probabilités, ce fut entre le retour de Barthélemy Diaz et son départ pour
l'Inde que Vasco da Gama épousa dona Catarina de Attayde. ne fallait pas, dit Duarte Pacheco, que pour
l'accomplissement de pareilles découvertes les navires fussent d'un port trop
considérable ou en trop grand nombre. En conséquence, le roi Notre Sire ordonna
la construction de quatre petits bâtiments dont le plus grand ne devait pas
excéder cent tonneaux, parce que, pour sa diriger vers des terres si peu
connues et même si complètement ignorées, il n'était pas nécessaire qu'ils
fussent plus grands.
Ceci fut ordonné pour qu'ils
pussent entrer et sortir présentement partout.
D'habiles constructeurs, secondés
par d'habiles ouvriers, les exécutèrent, en y employant les bois les plus
solides et les ferrements de première qualité. Chaque navire fut pourvu d'un tripla rechange de
voiles et d'amarres. Les autres apparaux aussi bien que les cordages furent
doublés trois a quatre fois. Lès fûts des tonneaux, des pipes, des
barils propres à contenir le vin, l'eau, lé vinaigre,
l'huile, furent renforcés par de
nombreux cercles de fer, pour assurer ce qu'ils contenaient. Les approvisionnements
en pain, vin, farine, viande, légumes, objets de pharmacie,
l'artillerie, l'armure de toutes sortes, tout fut fourni en aussi grande quantité que les
circonstances le requéraient. Il y eut même, on peut le dire, du superflu. Les
principaux pilotes, les meilleurs marins, les plus
habiles en l'art de la navigation
que renfermait le pays furent envoyés avec Vasco da Gama frère Paul, et le
Berrio un marin fort expérimenté, Nicolas Coelho.
Un officier de la maison de Vasco
da Gama était chargé de la pinque.
Les équipages de ces quatre
bâtiments ne s'élevaient qu'à cent soixante hommes, et pour les compléter il
fallut y joindre dix condamnés à mort. Las rôles des
équipages n'ont pas été conservés,
et l'on ne connaît les noms que
de quelques compagnons de Vasco da Gama. Parmi les pilotes se
trouvait Pero de Alemquez, qui avait accompagné Barthélemy Diaz, et parmi les
officiers deux interprètes, Fernâo Martins pour la langue arabe et Martim
Assomfo pour celle des noirs.
Port de Lisbonne |
Dès que l'escadre fut en état de
prendre la mer, Vasco da Gama se rendit avec ses officiers à la Cour, qui
résidait alors dans une petite ville de l'Alentejo, à quelques lieues d'Evora,
à Estrevoz.
Le roi Emmanuel reçut avec une
grande solennité le navigateur et ses compagnons.
Il leur rappela qu'ils avaient toute sa confiance et les encouragea. à exécuter
le projet qui devait assurer là grandeur.
du Portugal. Il donna ensuite à
Vasco da Gama des lettres pour le roi des Indes, l'itinéraire envoyé par Pedro
de Covilhã, et lui remit entre les mains un étendard où l'on avait représenté
les traits du Rédempteur. Vasco da Gama s'agenouilla, et prêta serment tant en
son nom qu'au nom de tous les siens; après quoi, il revint à Lisbonne, où
devait avoir lieu l'embarquement.
III
Jusqu'à ces derniers temps, l'on
était indécis sur le jour où partit Vasco da Gama. Aujourd'hui, l'on
sait d'une manière certaine que ce fut le samedi 8 juillet 1497. La flottille
mit à la voile à un endroit appelé le Restello ou le
Rostello. Non loin de là, à Belém, s'élevait une modeste église consacrée à la
Vierge et élevée par le prince Henri. La veille de son départ,
Vasco da Gama s'y était rendu avec ses gens pour y passer la nuit en
prière. Trois ans plus tard, à cette même place, l'on devait
bâtir une basilique et un monastère pour accomplir le voeu que l'on
avait fait dans le cas où l'expédition réussirait. Le lendemain, Vasco
da Gama et ses compagnons communiaient et se mettaient
ensuite en marche vers leurs vaisseaux..Ils y arrivèrent
pieds nus, la tête découverte, tenant un cierge à la main, en ordre de
procession, accompagnés d'un grand nombre de prêtres et de
moines et suivis d'une foule prodigieuse qui remplissait l'air de leurs
chants religieux. Arrivés sur le prodigieuse qui remplissait l'air de leurs
chants religieux. Arrivés sur le port, tous se mirent à genoux et reçurent de
nouveau l'absolution générale, comme pour mourir. Barthélemy Diaz avait donné
une idée si terrible des mers voisines du Cap des Tempêtes, qu'on regardait
comme autant de victimes condamnés à une mort presque certaine ceux qui
allaient les affronter. Désormais rassurés sur le salut de leurs âmes, ces
hommes se sentaient prêts à tout oser. Ordre fut donné de lever l'ancre
immédiatement.
La petite flottille ne tarda pas
à prendre la haute mer. Le 15 juillet, c'est-à-dire huit jours après son
départ; elle se trouvait en vue des Canaries, à peu de distance de l'île
Lanzarote. Avec le soir survint un brouillard qui prit tout à coup une telle
intensité que les bâtiments se perdirent de vue. On se rejoignit aux îles du Cap-Vert,
où l'on s'était donné rendez-vous, à l'île Santiago, et le jeudi 20 juillet l'escadre
mouillait devant la plage de Santa-Maria.
Le voyage de Vasco da Gama: du 8 juin de 1497 au 20 mai de 1498 |
La navigation n'offrit rien de
remarquable, d'autant plus que le vent était favorable.
Le 18 août, la flottille était
arrivée à environ deux cents lieues des îles du Cap-Vert, lorsque la vergue du
Sam-Gabriel se cassa; l'on dut mettre en panne pendant deux jours et une nuit
pour réparer cette avarie. Après quoi l'on se remit en marche. Les Portugais
calculaient qu'ils pouvaient être fort loin
de la côte, et cependant, à leur
grand étonnement, ils apercevaient de nombreux oiseaux ressemblant à
des hérons, qui Volaient contre le sud-ouest, comme pour regagner
la terre. Les vaisseaux continuaient leur route sans rien rencontrer.
Dans la deuxième quinzaine d'octobre, des baleines se
montrèrent en grand nombre, ainsi, que des phoques et des loups
marins. Le 1er novembre, on remarqua de nombreux indices de la
proximité de la terre, consistant en certaines espèces d'algues
flottant à la surface des flots, et qui ne croissent que le long des côtes. Le
4 novembre, à deux heures du matin, l'on jetait la sonde, et l'on trouvait fond
par cent dix brasses.
A neuf heures du matin, la terre
était en vue. Tous les bâtiments se pavoisèrent et l'on salua le
rivage par plusieurs décharges d'artillerie.
Après avoir côtoyé pendant quelques jours, on découvrit une côte basse où s'ouvrait une baie spacieuse offrant un abri assez sûr. Le mercredi 8 novembre, on y jeta l'ancre.
Cette baie reçut le nom de baie
de Sainte-Hélène. Les Portugais y restèrent huit jours, Vasco da
Gama voulait donner quelque repos à ses équipages et réunir
toutes les observations que cette
navigation de trois mois lui
avait suggérées. Le pays jouissait d'un climat salubre, et l'en y trouva
des oiseaux semblables à ceux du Portugal, tels que des corbeaux,
des mouettes, des tourterelles, des alouettes. Pour la première fois
l'on eut connaissance des Boschimens, qui se rattachent à la race des Hottentots.
Les Portugais furent assez heureux pour s'emparer de l'un d'eux, au moment où il
recueillait dans un fourré le miel que les abeilles en ce pays déposent au pied
des arbres. Les marques d'amitié que lui prodigua Vasco da Gama décidèrent
nombre de ses compagnons à venir voir les blancs et à entrer en rapport avec
eux. C'était un peuple sauvage, misérable, qui se nourrissait de chair de
gazelle, de poissons, de racines, et les Portugais ne purent en obtenir que fort
peu de renseignements. Les marchandises qu'on leur montrait, et qui
consistaient en cannelle, clous de girofle, perles, étaient pour eux inconnues.
Ils ne portaient pas d'autres ornements que des coquilles à l'apparence
argentée et de petites chaînes de cuivre qu'ils attachaient aux oreilles.
Quelques-uns avaient des queues de renard fixées à des bâtons, et ils s'en
servaient en guise de chasse-mouches. Ces noirs étaient d'humeur pacifique.
Néanmoins les Portugais en vinrent aux mains 'avec eux, et leurs relations finirent
d'une façon assez tragique.
Un soldat nommé Fernand Vellaso
avait obtenu l'autorisation d'aller se promener au village des indigènes afin
de voir leurs cases. Il était parti avec les noirs, qui s'en allèrent faire
rôtir et manger dans une lande un veau marin dont ils s'étaient emparés. Ils en
donnèrent une part au Portugais, ainsi que des racines dont ils se nourrissaient.
Le repas terminé, ils lui firent signe de retourner vers les vaisseaux, ne
voulant pas qu'il les accompagnât jusqu'à leurs cases. Vellaso revint-au rivage;
quand il l'eut atteint, il-se mit à appeler ses compagnons. Sur ces entrefaites
des noirs sortirent des halliers où ils étaient restés cachés et se mirent' à courir
le long de la plage. Vellaso, s'imaginant qu'on en voulait à sa vie, prit la
fuite. A ce moment les équipages faisaient de l'eau:
A la vue de leur compagnon, qui
paraissait être menacé par un danger imminent, ils coururent aux armes. De leur
côté, les nègres, en se voyant sur le point d'être attaqués, firent pleuvoir
une grêle de cailloux et de flèches. Vasco da Gama fut blessé avec trois ou quatre
hommes. Le combat aurait été acharné sans la prudence de Vasco da Gama, qui
donna le signal de la retraite. Le i6 novembre,
on quitta la baie de
Sainte-Hélène.
L'escadre gagna bientôt la pleine
mer. Les Portugais ignoraient où ils se trouvaient. Le pilote Pedro d'Alemquez,
qui avait accompagné Barthélemy Diaz, croyait qu'on devait être» à une
trentaine de lieues du Cap, et il ne se trompait pas beaucoup. La direction que
l'on suivait était le sud-est. Le samedi soir, 18 novembre, l'on aperçut le
Cap. Comme les vents étaient contraires, l'escadre dut pendant trois jours
courir des bordées, et, le mercredi 22 novembre, elle passait à midi devant le
cap redouté. II y avait quatre mois et demi qu'elle avait quitté Lisbonne.
Cette traverse avait été merveilleuse, étant données les difficultés éprouvées naguère
par Barthélemy Diaz pour atteindre le même but. En arrivant au cap de
Bonne-Espérance, les Portugais furent surpris de ne pas y
essuyer les tempêtes terribles
dont on leur avait tant parlé.
Dans son poème des Lusiades, Camoes,
et dans son magnifique récit, Osorio nous parlent des
luttes effroyables que les marins portugais auraient eu à soutenir contre les
flots de ces mers nouvelles, Les équipages se seraient mutinés; à un moment donné,
Vasco da Gama aurait dû faire mettre aux fers les chefs de la sédition et
prendre lui-même en main le gouvernail. Les choses se sont passées d'une manière
moins tragique. L'historien Barros, dont l'autorité semble croyable, ne fait
pas allusion à ces fureurs de l'Océan.
Il en est de même du journal publié
par l'un des compagnons de Vasco da Gama.
Pleins de confiance, les
Portugais continuèrent leur route et s'en allèrent mouiller, le 25 novembre, à
soixante lieues plus loin que le Cap, dans la baie de Saint-Braz. Vasco da Gama
y resta treize jours pour y réparer quelques avaries et en profita pour nouer
des relations avec les indigènes, les Gonaquas, qui appartenaient à la race
hottentote, alors si nombreuse. Ces indigènes par leurs
traits rappelaient beaucoup ceux
de la baie de Sainte-Hélène; comme eux ils étaient basanés. Ils formaient une
'peuplade de pasteurs, qui faisaient paître de nombreux
troupeaux le long du littoral.
Ces noirs paraissaient n'avoir
aucune crainte des blancs, et pour quelques verroteries qu'on leur donna, ils
amenèrent des bœufs, des vaches et des moutons. Ils pouvaient être quatre ou
cinq cents hommes, femmes et enfants. Quelques-uns d'entre eux se mirent à
jouer de la flûte et les autres à danser. Loin de vouloir troubler cette gaieté,
Vasco da Gama voulut la rendre plus complète
il fit sonner les trompettes, et
les équipages se mirent à exécuter une danse plus ou moins régulière..
la première messe à Santa Cruz
|
que portaient les nègres leur
firent supposer, et avec raison, que les éléphants devaient être fort nombreux
dans cette région. Les bœufs étaient de grande taille, quelques-uns noirs où
dépourvus de cornes. Ils paraissaient très doux, et les indigènes les montaient
en guise de chevaux, en leur faisant porter un bât confectionné en paille. A
l'entrée de la baie, il y avait un îlot où se donnaient
rendez-vous les loups marins, dont
certains étaient aussi grands que d'énormes ours, et qui avaient de grandes
dents et étaient fort redoutables.
L'on trouva aussi sur cet ilot de
nombreux pingouins, dont le cri, au dire des Portugais, ressemblait à celui de
l'âne. Comme ils ne connaissaient pas cet oiseau, ils le définirent, un canard
qui ne.
vole pas et n'a pas de plumes aux
ailes. La baie de Saint-Braz n'a pas, gardé son ancienne dénomination et a reçu
le nom hollandais de Mossel-Bay. Actuellement, une ville du même nom, assez
florissante par son commerce, s'élève sur ses bords. Les loups marins ont
disparu, ainsi que dans la plupart de ces parages. Avant de quitter cette baie,
Vasco da Gama fit élever sur sa rive une colonne surmontée d'une croix faite de
deux portions de mât.
Le navigateur continua sa route
et s'en alla mouiller dans un petit port situé à deux lieues de la baie de
Saint-Braz. Peu après, le jour de la Conception, profitant du vent qui était
devenu favorable, il remettait à la voile et prenait de nouveau la pleine mer.
Il fut alors tout à coup assailli
par l'une de ces terribles tempêtes, qui désolent si souvent ces parages. Les
matelots, ne doutant point que leur dernière heure fût venue, n'écoutaient plus
la voix de leurs chefs. Agenouillés sur le pont de leurs navires, ils
n'attendaient leur salut que de leurs prières et non de leurs manœuvres. Vasco da
Gama dut prendre lui-même le timon en main. Mais il est
inexact que ses hommes aient;
voulu le jeter à la mer. Le calme se rétablit enfin; les Portugais avaient
atteint le dernier des padraos élevés par Barthélemy Diaz durant son voyage,
l'îlot Da Cruz, et se trouvaient à cent vingt lieues du Cap. Au delà de cette
limite commençait l'inconnu. Vasco da Gama rasa une longue côte qu'il nomma
côte de la Natalité ou de Natal, parce qu'il l'avait découverte
le jour de Noël. Il y avait
urgence pour lui à gagner un port.
L'eau potable commençait à
manquer à ses équipages, qui en étaient réduits à faire cuire leurs aliments
avec l'eau de mer.
Heureusement, le 10 janvier, ils
découvrirent un petit fleuve à l'entrée duquel ils jetèrent l'ancre. Comme le
pays leur parut posséder beaucoup de cuivre, ce petit fleuve, reçut le nom de
Rio de Cobre (rivière du Cuivre).
Pendant la courte relâche qu'ils,
firent sur cette côte, les Portugais parvinrent à se débarrasser momentanément
du scorbut, qui commençait à les décimer. Ils avaient abordé à la région où
dominaient les Cafres; noirs de haute taille «t redoutables par leurs arcs de
grande dimension et leur zagaies garnies de longues pointes de fer: Leurs cases
étaient en paille, et ils n'avaient guère pour ustensiles que d'énormes
calebasses. Le pays semblait être assez agréable, et, à mesure que l'on
s'avançait à l'intérieur, il se couvrait de beaux arbres, on y voyait de
nombreux troupeaux.
L'on n'eut qu'à se louer des
noirs, qui prenaient plaisir à nouer des relations avec les blancs. Aussi les
Portugais, charmés d'un accueil aussi sympathique,
désignèrent cette contrée sous le nom de terra da Boa Gente, la terre de la
Bonne Nation. Ce nom est resté, car on appelle encore aujourd'hui Aiguadé da
Boa Gente ou da Boa Paz un mouillage situé au nord de la baie de Lourenço Marqués,
entre le fleuve de Lagoa et celui d'Inhampura.
IV
Jusqu'alors Vasco da Gama avait
suivi exactement les indications de Barthélémy Diaz et s'était tenu à proximité
du continent. Désormais, manquant de renseignements, il avait dû se fier à sa
propre inspiration, car à partir de la terra da Boa Gente, la côte fait une courbe
assez sensible. Il craignait, en la suivant de trop près, de pénétrer dans un
golfe d'où il lui serait difficile, sinon impossible
de sortir; aussi préféra-t-il
prendre le large. Il passa ainsi, sans s'en douter, en vue de Sofala, ville
alors riche et commerçante où il eut été facile de trouver du repos et de se
ravitailler, et un peu plus au nord il prenait terre à l'embouchure d'un fleuve
qui n'était autre que le Zambèze. Les habitants de ce pays étaient des nègres, mais
parmi eux se trouvaient des hommes au teint olivâtre, ce qui indiquait le voisinage des
blancs. Ils portaient des pagnes de coton, de toile peinte, des turbans, des
bonnets de soie. ou d'étoffe, garnis d'ornements en or et en argent. Leurs
barques n'étaient pas des pirogues comme celles des sauvages, mais des almadies
dont lès voiles étaient faites de feuilles de palmier et qu'ils maniaient avec
dextérité. Il s'en trouva parmi eux qui parlaient l'arabe.
Ils entretinrent Vasco da Gama et ses
compagnons et les assurèrent qu'en montant plus haut ils trouveraient des
blancs comme eux, des vaisseaux à peu près. semblables aux leurs, qui se
rendaient dans de riches contrées situées au delà de l'Océan, pour y faire le commerce.
Ces indications ranimèrent le
courage des Portugais, qui étaient presque désespérés de ne, trouver partout
sur leur route que des peuplée misérables dont ils ignoraient la langue, et
dont ils pouvaient à peine tirer quelques vivres. Certain d'achever le tour de l'Afrique
et persuadé qu'il était- sur. là route des Indes, Vasco da Gama sentait renaitre
ses forces avec son espérance. Il prit la résolution de faire radouber ses)vaisseaux;
qui en avaient grand besoin;
il fut en, cela aidé par les indigènes, qui. lui donnèrent tous les secours
dont ils pouvaient disposer. S'il ne put pénétrer dans l'intérieur du pays, il
remarqua que le fleuve où il était entré devait être important et que. sur ses
rives, des arbres de haute futaie formaient de véritables forêts: L'intention
du navigateur était de relâcher seulement quelques
jours; mais, contrairement à ses prévisions, il fut retenu pendant tout un mois
à cause des ravages que le scorbut faisait de nouveau
parmi ses équipages.
Les matelots attribuaient cette
maladie, qu'ils semblaient ignorer, aux viandes salées dont ils faisaient à peu
près exclusivement leur nourriture depuis qu'ils étaient partis de; Lisbonne.
Malgré ce retard, Vasco da Gama était plus résolu que jamais.
Les Portugais ne pouvaient que
conserver un bon souvenir de ce pays, où leur espoir, qui commençait à faiblir,
s'était transformé en certitude, grâce aux renseignements que leur avaient
donnés les habitants. Avant de partir, ils élevèrent un padrao qu'ils
appelèrent Raphaël, en l'honneur du bâtiment de l'escadre qui portait ce nom.
Le fleuve reçut celui de Rio dos bons signaes, le fleuve des bons signaux. Il
n'a pas conservé cette appellation, et le nom de Zambèze, par lequel les
indigènes le désignaient, l'a emporté.
Vasco da Gama reprit enfin la mer
le 24 février, et après avoir fait route vers le nord-ouest, il s'en alla jeter
l'ancre à une lieue de Mozambique, à l'entrée de la baie d'une petite île, le 2
mars 1498. Dès que les vaisseaux portugais parurent, sept barques ou almadies
s'avancèrent pleines de gens et au son d'instruments de musique qui
ressemblaient à des hautbois et à des trompettes et que l'on appelait a no fils;
ils engagèrent les Portugais à pénétrer dans la baie et leur firent de nombreux
signes pour les inviter à descendre à terre. Ces barques accostèrent les
vaisseaux, et leurs équipages montèrent à bord. Les Portugais firent bon accueil
à leurs visiteurs, et dans le désir de se concilier leur amitié, ils leur
offrirent une collation. Au bout de quelques
jours, après des relations suivies avec les indigènes,
Vasco da Gama ordonna d'amener
les voiles et fit jeter l'ancre.
V
Mozambique, comme toutes les
villes de la côte orientale d'Afrique, était au pouvoir des musulmans.
Autrefois, le christianisme avait compté de nombreux adeptes dans toute cette
région, mais les vexations, les mauvais
traitements en avaient sensiblement réduit le nombre. Les quelques
chrétiens qui se trouvaient encore à Mozambique étaient désignés sous le nom
d'Abyssins, ce qui était la preuve que cette partie de l'Afrique avait dû être évangélisée
par des missionnaires venus d'Ethiopie. Les indigènes avaient le teint cuivré
et parlaient, nous disent les Portugais, la langue des Maures. Leur costume
se composait d'étoffes de lin et de coton de diverses couleurs, plus ou moins
ouvragées, suivant leur condition sociale. Tous portaient des turbans avec des
lisérés de soie brodés de fils d'or. Ils se livraient pour la plupart au commerce
et trafiquaient avec les Maures blancs. En rade se trouvaient quatre navires
chargés d'or, d'argent, de clous de girofle, de poivre, de gingembre, de perles
et de rubis. Presque tous les habitants de Mozambique professaient l'islamisme;
ils étaient gouvernés par un prince' qui portait le nom de sultan.
La ville n'avait alors rien de
remarquable. Les maisons, consistaient en cabanes en terre, couvertes de
paille.
Les seules constructions en pierre
étaient. la mosquée et la demeure du sultan.
Aux environs de la ville, l'on
voyait beaucoup de palmiers et l'on trouvait des concombres et des melons..
Les Portugais s'étaient empressés
de questionner les indigènes et en avaient obtenu de nombreux renseignements.
On leur avait dit que les riches
produits dont les quatre vaisseaux en rade étaient chargés avaient été apportés
par les Maures, et qu'en continuant leur voyage ils trouveraient de l'or, des
perles fines, des pierres précieuses, des épices, en si grande abondance qu'on
les ramassait à pleins paniers. Ils apprirent que, sur la route qui leur
restait à parcourir, ils rencontreraient nombre
de villes, le long de la côte, et
une île qui possédait de grandes richesses et dont la population était partie
musulmane et partie chrétienne. Vasco da Gama et ses compagnons demandèrent
naturellement des nouvelles du Prestre Jean. On leur répondit qu'il ne
demeurait pas loin, qu'il possédait sur le bord de la mer plusieurs villes dont
les habitants étaient de riches marchands qui équipaient de grands navires.
L'on ajoutait que le Prestre Jean résidait dans l'intérieur du pays, et que
pour se rendre dans sa capitale il fallait y aller à dos de chameau. Tous ces renseignements comblaient de
joie les Portugais, qui ne demandaient qu'à achever leur entreprise.
Rondache indienne XIXème |
Les indigènes se proposaient
d'attirer les Portugais et leur chef dans quelque embuscade, et de s'emparer
par surprise de leurs personnes. Mais Vasco da Gama s'était douté de leurs
intentions.
Quoique le sultan lui eût donné
les deux pilotes qu'il lui avait demandés, il était défiant, et avec raison.
Deux chaloupes à bord desquelles il se trouvait, étant allées faire de l'eau,
se virent attaquées par cinq ou six almadies remplies de gens armés d'arcs, de
flèches et de rondaches. On leur tira quelques coups de bombarde; en même temps, Paul da
Gama, qui était demeuré sur les vaisseaux, se tenant prêt à agir en cas
d'événement, ordonna, au bruit de l'artillerie, au Berrio de se mettre en
marche, afin de pouvoir porter secours à son frère et à ses compagnons. Il n'en
fallait pas davantage pour terrifier les Maures, qui se hâtèrent de gagner le
rivage.
Vasco da Gama, pensant qu'il
n'était pas prudent de rester dans la baie, où sa petite escadre était exposée
à être cernée par les barques indigènes, avait regagné avec ses vaisseaux où il avait mouillé en arrivant. Les chèvres, les poules et les pigeons que ses
gens avaient troqués avec les habitants contre des rasades de boisson jaune
firent faire bonne chère à ses équipages fatiguas de la viande salée. Il resta
là plusieurs jours, attendant un temps favorable, et aussi les événements. Dans
l'intervalle, le sultan de Mozambique était entré en pourparlers avec les
Portugais protestant de ses intentions pacifiques, et leur avait envoyé à titre
d'ambassadeur un Maure blanc, qui se donnait la qualité de chérif et se disait
originaire des environs de la Mecque.
Comme Vasco da Gama n'avait pu faire
sa provision d'eau, il écouta les propositions qui lui étaient faites. Sur son
ordre, le capitaine Coelho entra dans le port avec plusieurs chaloupes. A peiné
était-il débarqué près de l'aiguade, qu'il vit une vingtaine d'indigènes armés
de zagaies qui se disposaient à l'attaquer.
Quelques coups de bombarde mirent
en fuite les agresseurs, et l'on put faire de l'eau; Deux jours après, un Maure
qui paraissait avoir quelque importance venait dire aux Portugais que, s'ils
voulaient avoir de l'eau, ils pouvaient aller en chercher, et que s'ils y
allaient, ils trouveraient des gens qui les obligeraient à retourner sur leurs pas.
C'était une provocation. Vasco da Gama envoya les chaloupes dans la direction
du village que ce Maure avait indiqué. Les indigènes
s'y étaient barricadés; les
Portugais furent reçus avec des injures et assaillis par une grêle de pierres
et de flèches. A cette hostilité J'on répondit par quelques décharges
d'artillerie et de mousqueterie qui tuèrent plusieurs des agresseurs. En
revenant à leurs vaisseaux, les Portugais capturèrent deux almadies.
Les gens qui montaient l'une d'elles eurent le temps de se sauver en se jetant à la côte; l'équipage de l'autre, qui se composait de quatre nègres, fut fait prisonnier et conduit à bord. Pendant les différents combats que l'on avait eu à livrer, l'un des deux pilotes que le sultan avait donnés était parvenu à s'échapper. Vasco da Gama vit qu'il ne lui servirait à rien de prolonger son séjour à Mozambique, et,' le 29 mars, il ordonnait de mettre à la voile, après avoir envoyé quelques coups de canon à cette plage si peu hospitalière.
L'escadre avait pris la direction
de l'est, mais il y avait fort peu de vent; deux jours après son départ, elle
avait à peine fait trente lieues. L'on ne pouvait guère se fier au pilote que
le sultan de Mozambique avait fourni, et l'on ne tarda pas à avoir des preuves de
sa perfidie. L'on avait aperçu quelques îles, qui étaient les
Quérimbas. Elles forment un
archipel s'étendant du sud au nord sur un espace de 250 kilomètres. Le pilote
voulait donner à entendre que ces îles étaient la terre ferme; son intention
était d'y engager les vaisseaux portugais, dans l'espoir qu'ils donne raient
sur quelque récif et pourraient y périr. Heureusement l'on se doutait de ses desseins. Pour
le punir de son mensonge, Vasco da Gama lui fit donner de la corde si durement
que la première de ces Mes, en vue de laquelle cette correction lui fut administrée,
reçut le nom d'ilha do açontado, l'île du fustigé cette dénomination lui est restée. Ainsi
corrigé, le pilote promit de conduire l'escadre à Quiloa, qu'il disait être une
ville riche, commerçante et habitée en partie par des chrétiens.
Mais ce qu'il
n'ajoutait pas, c'est qu'il espérait que les événements de Mozambique seraient
connus à Quiloa, que les Portugais y recevraient un accueil de même nature et
que peut-être ils pourraient succomber dans quelque guet-apens. Les vents
contraires étant venus contrecarrer ses intentions criminelles il dit à Vasco
da Gama qu'il allait le conduire à Mombazes, où il trouverait les mêmes
avantages qu'à Quiloa, et que comme cette ville elle avait pour habitants des chrétiens
et des musulmans. De plus, il affirmait que les Portugais y seraient très bien
reçus.
Cette assertion était fausse.
Vasco da Gama n'attachait que peu
de foi à ses dires, mais comme il se voyait sur le point de manquer de vivres,
il consentit à aller à Mombazes, et le 7 avril, au soir, il jetait l'ancre en
face de cette ville. De nombreux navires entraient dans son port, dont l'entrée
était défendue par un château en assez bon état. L'or, y trouvait 'des
marchands chrétiens, mais les musulmans les tenaient dans une véritable
infériorité, et ils avaient à subir de leur part de nombreuses vexations.
La traite y était en honneur, et
Ton y voyait beaucoup d'esclaves, qui pour la plupart étaient des chrétiens.
Grâce à ses maisons de pierre, Mombazes avait l'apparence d'une ville
européenne.
Elle produisit une impression
favorable sur les Portugais, qui la jugèrent comme un séjour délicieux.
Aujourd'hui, tel n'est pas l'avis des Européens.
Vasco da Gama, que les trahisons
précédentes avaient mis sur la défiance, ne voulait pas entrer dans le port et
se tenait au large.
Armeria 1523 |
Dans la rade, un brigantia monté
par un nombreux équipage était venu rejoindre l'escadre, et dans le port tous
les navires s'étaient pavoisés comme pour souhaiter la bienvenue aux étrangers. Les Portugais
tout d'abord étaient pleins de confiance; ils espéraient pouvoir descendre a
terre le lendemain.
Mais leur espoir fut de courte
durée. Ils furent bientôt assaillis par les indigènes et ne purent mouiller
qu'à huit lieues de Mombazes. Un des prisonniers qu'ils tirent leur donna des
indications sur la direction de Mélinde Vasco da Gama mit à la voile
immédiatement vers cette ville; le jour même de son départ de Mombazes, et
après quelques heures de navigation il y arriva et jeta l'ancre à une
demi-lieue du rivage.
Mélinde était alors une belle ville,
assise dans une plaine où se trouvait un nois ae palmiers et entourée de jardins
et de cultures de mil et de légumes variés. Des maisons grandes, élevées,
blanchies à la chaux et percées de nombreuses fenêtres. Son
commerce était florissant et sa population considérable. Certains historiens
ont été jusqu'à l'évaluer, en exagérant à 200 000 âmes.
Le souverain de Mélinde était un
vieillard fort aimé et fort respecté, à cause de sa bienveillance. Avant de
prendre terre, Vasco da Gama lui dépêcha un des Maures qu'il avait fait
prisonniers au sortir de Mombazes, pour l'assurer de ses intentions pacifiques
et, en même temps, pour lui exprimer le désir qu'il avait d'entrer en rapport
avec lui.
Le sultan de Mélinde fut flatté
de cette démarche; l'idée de voir son amitié recherchée par des étrangers venus
de si loin ne pouvait que satisfaire son orgueil. Il répondit qu'il recevrait
les Portugais avec plaisir, et qu'il leur procurerait des pilotes, des
provisions et tout ce dont ils pourraient avoir besoin.
Mais, comme l'a dit Camoes, les
délices de Mélinde ne pouvaient captiver Vasco da Gama, une vaste mer lui
restait a parcourir. Le 24 avril 1498, l'escadre leva l'ancre pour gagner
Calicut.
VI
Le trajet de Mélinde à la côte de
Malabar est de sept à huit cents lieues. Les Portugais se dirigèrent d'abord
vers le nord, sans trop s'éloigner du rivage, et bientôt ils prenaient une
nouvelle direction, celle de l'est. En dépit de la saison très défavorable,
leur traversée fut heureuse. Quelques jours après leur départ de Mélinde, ils aperçurent
l'étoile polaire, qu'ils n'avaient pas vue depuis longtemps, et peu après ils
repassèrent la ligne. Comme ils avaient le vent en poupe, leur marche était
assez rapide. Le 17 mai, après une navigation de vingt-trois jours, l'escadre
découvrit une terre que l'on ne put d'abord reconnaitre, à cause des
brouillards qui résultaient des pluies
et des orages. L'on était alors à l'époque de la mousson.
La sonde fut jetée, et l'on
constata que l'on trouvait fond à quarante-cinq brasses. L'escadre s'écarta de
la côte et le lendemain elle vint de nouveau la chercher. Elle mit près de deux
jours à s'en approcher peu à peu. Le pilote reconnut alors que la montagne que
l'on voyait était celle qui dominait la ville de Calicut, la cité la plus riche
et là plus commerçante de l'Inde à cette époque.
A l'annonce de cette heureuse
nouvelle, Vasco da Gama se sentit transporté de joie. Il était arrivé dans
l'Inde, et il lui semblait qu'il ne devait plus rencontrer d'obstacles pour
achever son expédition.
Le soir même de ce jour,
l'escadre s'en alla mouiller non à Calicut, mais à deux lieues plus loin, à un
village nommé Capoua (Capocate). On jeta l'ancre à une demi-lieue en mer. La
traversée avait duré vingt-six jours. Vasco da Gama était parti le 24 avril de
Mélinde, et il touchait au rivage le 19 mai 1498. Il y avait près de onze mois
qu'il avait quitté l'Europe.
Le souverain de Calicut, qui
portait le titre de zamorin, dominait sur la côte de Malabar. Les Portugais se
mirent en rapport avec lui, mais, grâce aux intrigues des marchands mulsumans,
ils n'eurent pas trop à se louer de son accueil. Vasco da Gama dut même
employer la force et disperser à coups de canon les nombreuses barques
indigènes qui voulaient s'emparer de ses vais seaux. Il ne tarda pas à
retourner en Europe pour préparer une seconde expédition avec de nouvelles
forces.
Il avait levé l'ancré le 29 août
1498. Contrairement à ses espérances, de nombreux obstacles surgirent
devant lui. Des circonstances imprévues l'avaient mis dans l'impossibilité
d'annoncer la grande nouvelle de sa découverte au roi Emmanuel. Une effroyable tempête
le sépara, aux îles du Cap-Vert, des autres bâtiments de sa flotte, et tandis
que Coelho, se persuadant que le vaisseau
amiral était devant lui, allait
de l'avant, il se vit lui-même forcé d'atterrir à Tercère, où son jeune frère
Paul, miné par la maladie contractée au cours du voyage, dut se faire
transporter à l'hôpital.
Vasco da Gama remit le
commandement de son navire à un de ses lieutenants, Joao da Sa, et ne quitta
Tercère que lorsque son frère eut rendu le dernier soupir.
Inhumation du corps de Paulo da Gama
dans le couvent de San Francisco
|
Alors, l'âme
ulcérée, il franchit sur une simple caravelle la distance qui le séparait de sa
patrie. Il rentrait le 29 août 1499 à Lisbonne, après une absence de deux ans.
De tout son équipage il ne restait que 55 hommes sur 160.
Avant d'entrer dans la ville, le
découvreur des Indes voulut s'arrêter dans l'église Notre-Dame. Son entrée dans
Lisbonne fut triomphale. La capitale s'illumina. Des feux de joie étaient
allumés dans les rues et sur les places. Pendant plusieurs jours ce ne furent que
jeux et fêtes. Les Portugais voyaient le but de leurs longs efforts
victorieusement atteints, le commerce de l'Orient devenu leur monopole et leur;
pays élevé au rang de première puissance maritime de l'Europe.
La route était connue, frayée, et l'on ne se laisserait plus émouvoir par l'annonce de périls imaginaires, le plus fort était fait; les rêves d'or devenaient une réalité que le roi D. Manuel escomptait d'avance, en ajoutant à ses titres celui de « seigneur de la conquête et de la navigation de l'Ethiopie, de l'Arabie, de la Perse et des Indes Quant au marin intrépide qui venait d'assurer au
commerce de sa patrie une nouvelle voie, et qui allait lui procurer une incalculable
moisson de lauriers, il dut attendre deux ans son titre d'amiral des Indes, retard que le roi lui fit oublier, en l'autorisant à joindre à son nom la particule dom, alors si rarement octroyée,
en le gratifiant d'une somme de 2000 écus d'or, et en lui conférant sur le commerce de l'Inde certains privilèges qui ne devaient pas tarder à l'enrichir.
Cette voie, si audacieusement ouverte par Vasco da Gama, fut immédiatement suivie par Alvares Cabral, à qui l'on doit la découverte du Brésil, et Jâo da Nova, qui reconnut Sainte-Hélène. Tous deux eurent à lutter énergiquement contre les Maures, qui comprenaient que le commerce des Indes allait leur échapper. La situation fut bientôt si tendue, que da Gama fut une seconde fois envoyé dans l'Inde, avec mission d'imposer aux Hindous le commerce qu'ils refusaient de faire avec les Portugais, et de créer des forteresses qui fussent non seulement en état de résister aux attaques des mécontents, mais encore de servir de base pour maintenir d'une façon durable la domination du Portugal
sur ces nations qui s'y montraient si résolument réfractaires. A la tête d'une flotte de dix vaisseaux, da Gama agit avec une vigueur et une décision qu'on a taxées de cruauté, mais qui lui semblaient nécessaires pour briser par la terreur toute résistance.
Bombardement de calicut
|
Les habitants de Calicut, au mépris des traités, avaient massacré les Portugais,
surpris dans leur factorerie. Vasco da Gama résolut d'en tirer vengeance, et
pendant trois jours consuma la ville, qu'il détruisit en grande partie.
Pensant que la leçon serait salutaire, il visita ensuite Cochin, dont le souverain
s'était montré fidèle, et reprit la route d'Europe après avoir dispersé une
nouvelle flotte malabare.
Il ne semble pas que les services
rendus par le héros aient été récompensés comme ils le méritaient. On lui
accorda le titre de comte de Vidigueira, mais on le laissa lui-même pendant
vingt et un ans dans l'oubli.
Ce n'est qu'en 1524 qu'il fut nommé vice-roi de
l'Inde, en même temps que le roi D. Jean III le chargeait d'une nouvelle
mission dans les régions conquises qu'il s'agissait maintenant d'organiser.
Parti de Lisbonne le 9 avril, Vasco da Gama mourut trois mois et vingt jours
après avoir atteint le siège de son gouvernement.
Inhumé à Cochin, son corps fut
ramené en Europe en 1538 et déposé dans la petite église de Nossa Senhora das
Reliquias da Vidigueira. Après tant de vicissitudes et de voyages.
Vasco da Gama le « grand
argonaute », comme disait l'inscription de son tombeau, ne reposa pas en paix;
son cercueil fut violé en 1840.
Il se trouve aujourd'hui avec celui de Camoes
dans l'église des Hiéronymites à Belém.
Audiance du Samorin de Calicut |
1 commentaire:
Bonsoir, je voudrais vous demander, s'il vous plaît, où avez-vous obtenu l'image des deux navires en dessous du Rondache indienne XIXème? C'est très important pour moi parce que j'écris un livre sur les images des billets de banque espagnols et que ces deux navires apparaissent sur le billet de 400 escudos de 1871 et je l'apprécierais beaucoup, mon email est jumami77@hotmail.com
Je vous remercie d'avance
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