La reconquista portugaise

Son fils, Alphonse le Conquérant, étendit son royaume jusqu'au Tage ; il répandit la terreur de son nom parmi les musulmans, et, à la suite d'une grande victoire qu'il remporta sur eux à Castro Verde en 1139, il se fit proclamer roi par les Cortès, qu'il réunit à Lamego en 1143.

Il s'empara de Lisbonne en 1147. Avec lui est fondée la dynastie Alphonsine ou de Bourgogne, qui, jusqu'en 1383, donna au Portugal une suite de rois remarquables qui laissèrent des souvenirs ineffaçables dans les populations et méritèrent presque tous des titres qui les consacrent dans l'histoire.
Sanche Ier, fils d'Alphonse, reçut celui de «colonisateur» ou « fondateur», à cause des encouragements qu'il donna à l'agriculture et au commerce et du grand nombre de villes et de bourgs qu'il fonda.
Alphonse II continua la lutte contre les musulmans et contribua à la victoire de Navas de Tolosa, remportée sur les Almohades et qui sauva la monarchie espagnole.

Attaque d'Alcacer do Sal par D. Affonso Henriques (1159)

D. Affonso Henriques bat le Roi de Badajoz (1169)

Soldat d'infanterie 1139. Affonso Henriques à Ourique

A Alphonse III est due la conquête de l'Algarve, qui compléta le royaume du Portugal et lui donna les limites qu'il possède encore aujourd'hui. A cette époque (1246-1279), les villes possédaient de grandes franchises municipales qu'elles avaient obtenues de la munificence royale. Les rois de Portugal étaient entrés en lutte avec le clergé alors tout puissant et cherchaient un appui auprès du peuple.

Alphonse III  (1210-1279)

Alphonse III était le roi des pauvres. Son fils Denis, surnommé le Roi laboureur et le Père de la patrie, était, selon les chroniques de l'époque, le meilleur des rois et le plus ami de la justice. Ces titres disent assez ce qu'il fit pour son pays. L'agriculture développée et protégée, les rivages mouvants de la mer fixés par des plantations de pins maritimes, la navigation prenant son premier essor, les lettres encouragées par la fondation de l'Université de Coimbra, la justice régnant dans les tribunaux et protégeant les intérêts des citoyens : telle fut l'œuvre de ce prince à jamais populaire dans le cœur des Portugais. Alphonse IV, le Brave, prit part à la fameuse bataille de Salado (1340), nommée la « Grande Journée des chrétiens » et qui mit un terme aux invasions des mahométans du Maroc : leur innombrable armée y fut anéantie.

C'est sous ses yeux que fut égorgée, sinon avec son assentiment, du moins sans opposition de sa part, a vertueuse Inès de Castro, épouse de son fils Pedro Ier, le Justicier, vengea cruellement par la suite la femme qu'il regretta toute sa vie ; prince sévère, mais épris de la justice, il administra sagement son royaume, mais ne fut pas imité par son fils Fernand. Sous le règne de ce dernier, les Castillans envahirent à deux reprises le Portugal. Fernand, ayant eu l'imprudence de protester contre l'avènement de Henri de Transtamare au trône de Castille et de lui déclarer la guerre, appela les Anglais à son secours : ces alliés perfides traitèrent le Portugal en pays conquis. A sa mort (1383), selon la constitution établie en 1143 par les Cortès de Lamego, qui admettaient l'accession des femmes au trône, sa fille Béatrix devait régner, à moins qu'elle n'eût épousé un prince étranger; or elle était mariée au roi de Castille.

 La constitution, il est vrai, avait été modifiée sur ce point sous Fernand et sur la proposition du roi, qui avait réuni les Cortès dans ce but, et le trône avait été garanti à sa fille.

La conséquence devait être forcément la réunion des deux royaumes du Portugal et de Castille sous un même sceptre. Les Portugais refusèrent de reconnaître les droits de Béatrix. En vain, pour soutenir et faire triompher ses droits, les Castillans prirent-ils les armes. Ils envahirent le Portugal et vinrent mettre le siège devant Lisbonne, qui résista héroïquement et les repoussa. Les Portugais triomphants proclamèrent roi un fils naturel de Pedro Ier, Jean, grand maître de l'ordre d'Avis, au détriment d'un autre fils de Pedro, né d'Inès de Castro, don Juan, retenu à la cour de Castille.

Nous sommes maintenant à l'époque la plus brillante de l'histoire du Portugal. Sous les princes de la maison d'Avis, dont plusieurs ont été des souverains remarquables, la nation portugaise va grandir avec les découvertes maritimes ; sa puissance prendra un accroissement prodigieux ; ses navires vont couvrir les mers et ses richesses seront incalculables. Cette glorieuse période, qui durera deux siècles, prendra fin avec la domination espagnole, en 1580.

Suite : La bataille d'Aljubarotta