Francisco de Almeida (né vers 1450 à Lisbonne, mort le 1er mars 1510 près du Cap)

Francisco d'Almeida reçoit l'ambassadeur du roi de Narsinga
Almeida était parti de Belem, en 1505, avec une flotte de vingt-deux voiles portant quinze cents hommes de troupes. Tout d'abord il s'empara de Quiloa, puis de Mombaça, dont «les chevaliers, comme les habitants se plaisaient à le répéter, ne se rendirent pas aussi facilement que les poules de Quiloa. » De l'immense butin qui tomba dans cette ville entre les mains des Portugais, Almeida ne prit qu'une flèche pour sa part de butin, donnant ainsi un rare exemple de désintéressement.

Roi de Cochin sur son éléphant


Après avoir relâché à Mélinde, il atteignit Cochin, où il remit au radjah la couronne d'or qu'Emmanuel lui envoyait, tout en prenant lui-même, avec cette présomptueuse vanité dont il donna tant de preuves, le titre de vice-roi.
Puis, étant allé fonder à Sofala une forteresse destinée à tenir en respect tous les musulmans de cette côte, Almeida et son fils coururent les mers de l'Inde, détruisant les flottes malabares, s'emparant des navires de commerce, faisant un mal incalculable à l'ennemi, dont ils interceptaient ainsi les anciennes routes.
Mais, pour pratiquer cette guerre de croisières, il fallait une flotte à la fois considérable et légère, car elle n'avait guère, sur le littoral asiatique, d'autre port de refuge que Cochin. Combien était préférable le système d'Albuquerque, qui, s'établissant dans le pays d'une façon permanente, en créant partout des forteresses, en s'emparant des cités les plus puissantes d'où il était facile de rayonner dans l'intérieur du pays, en se rendant maître des clefs des détroits, s'assurait avec bien moins de risques et bien plus de solidité le monopole du commerce de l'Inde !
Cependant, les victoires d'Almeida, les conquêtes d'Albuquerque. avaient profondément inquiété le soudan d'Égypte. La route d'Alexandrie abandonnée, c'était une diminution considérable dans le rendement des impôts et des droits de douane, d'ancrage et de transit qui frappaient les marchandises asiatiques traversant ses états. Aussi, avec le concours des Vénitiens qui lui fournirent les bois de construction nécessaires, ainsi que d'habiles matelots, il arma une escadre de douze navires de haut bord, qui vint chercher jusqu'auprès de Cochin la flotte de Lourenço d'Almeida et la défit dans un sanglant combat où celui-ci fut tué. Si la douleur du vice-roi fut grande à cette triste nouvelle, du moins il n'en laissa rien paraître et mit tout en oeuvre pour tirer une prompte vengeance des Roumis, appellation sous laquelle perce la longue terreur causée par le nom des Romains et commune alors sur la côte de Malabar à tous les soldats musulmans venus de Byzance. Avec dix-neuf voiles, Almeida se rendit d'abord devant le port où son fils avait été tué et remporta une grande victoire, souillée, nous devons l'avouer, par de si épouvantables cruautés qu'il fut bientôt à la mode de dire : « Puisse la colère des Franguis tomber sur toi comme elle est tombée sur Daboul». Non content de ce premier succès, Almeida anéantit quelques semaines plus tard devant Diu les forces combinées du sultan d'Égypte et du radjah de Calicut.

victoire du Vice-Roi D. Francisco D'Almeida contre le sultan de l'Egypte, et des rois de Cambaya et Calecut
Cette victoire eut un prodigieux retentissement dans l'Inde, et mit fin à la puissance des Mahumetistes d'Égypte.
Joao da Nova et les capitaines qui avaient abandonné Albuquerque devant Ormuz, s'étaient alors décidés à rejoindre Almeida; ils avaient expliqué leur désobéissance par des calomnies à la suite desquelles des informations judiciaires venaient d'être commencées contre Albuquerque, lorsque le vice-roi reçut la nouvelle de son remplacement par ce dernier. Tout d'abord, Almeida avait déclaré qu'il fallait obéir à cette décision souveraine; mais, influencé par les traîtres qui craignaient de se voir sévèrement punis lorsque l'autorité serait passée entre les mains d'Albuquerque, il regagna Cochin, au mois de mars 1509, avec la détermination bien arrêtée de ne pas remettre le commandement à son successeur. Il y eut entre ces deux grands hommes de fâcheux et pénibles démêlés, où tous les torts appartinrent à Almeida, et Albuquerque allait être renvoyé à Lisbonne, les fers aux pieds, lorsque entra dans le port une flotte de quinze voiles sous le commandement du grand maréchal de Portugal, Fernan Coutinho.
Celui-ci se mit à la disposition du prisonnier, qu'il délivra aussitôt, signifia encore une fois à d'Almeidales pouvoirs qu'Albuquerque tenait du roi, et le menaça de toute la colère d'Emmanuel s'il n'obéissait pas. Almeida n'avait qu'à céder, il le fit noblement. Quant à Joao da Nova, l'auteur de ces tristes malentendus, il mourut quelque temps après abandonné de tous, et n'eut guère, pour le conduire à sa dernière demeure,que le nouveau vice-roi, qui oubliait généreusement ainsi les injures faites à Alphonse d'Albuquerque.
Aussitôt après le départ d'Almeida, le grand maréchal Coutinho déclara que, venu dans l'Inde avec la mission de détruire Calicut, il entendait mettre à profit l'éloignement du zamorin de sa capitale. En vain le nouveau vice-roi voulut-il modérer son ardeur et lui faire prendre quelques sages mesures commandées par l'expérience : Coutinho ne voulut rien entendre, et Albuquerque dut le suivre.
Tout d'abord Calicut, surprise, fut facilement incendiée; mais les Portugais, s'étant attardés au pillage du palais du zamorin, furent vivement ramenés en arrière par les naïres, qui avaient rallié leurs troupes. Coutinho, emporté par sa bouillante valeur, fut tué, et il fallut toute l'habileté, tout le sang-froid du vice roi pour permettre aux troupes de se rembarquer sous le feu de l'ennemi, et empêcher la destruction complète des forces envoyées par Emmanuel.
Revenu à Cintagara, port de mer dépendant du roi de Narsingue, dont les Portugais avaient su se faire un allié, Albuquerque apprit que Goa, capitale d'un puissant royaume, était en proie à l'anarchie politique et religieuse. Plusieurs chefs s'y disputaient le pouvoir. L'un d'eux, Melek Çufergugi, était sur le point de s'emparer du trône, et il fallait profiter des circonstances et attaquer la ville avant qu'il eût pu réunir sous sa main des forces capables de résister aux Portugais.
Le vice-roi comprit toute l'importance de cet avis. 

Goa

La situation de Goa, qui conduisait au royaume de Narsingue et dans le Dekkan, l'avait déjà vivement frappé. Il n'hésita pas, et bientôt les Portugais comptèrent une conquête de plus. Goa-la-Dorée, ville cosmopolite où se coudoyaient, avec toutes les sectes de l'islam, des Parsis, adorateurs du feu, et même des chrétiens, subit le joug d'Albuquerque, et devint bientôt, sous sa sage et sévère administration, qui sut se concilier les sympathies des sectes ennemies, la capitale, la forteresse par excellence, le siège de commerce principal de l'empire portugais aux Indes. Insensiblement et avec les années, la lumière s'était faite sur ces riches contrées.
Des informations nombreuses avaient été réunies par tous ceux qui, de leurs hardis vaisseaux, avaient sillonné ces mers ensoleillées, et l'on savait main tenant quel était le centre de production de ces épices, qu'on était venu chercher de si loin et à travers tant de périls. Déjà depuis plusieurs années, Almeida avait fondé les premiers comptoirs portugais à Ceylan, l'antique Taprobane. Les îles de la Sonde et  la presqu'île de Malacca excitaient maintenant l'envie de ce roi Emmanuel, déjà surnommé le Fortuné. Il résolut d'envoyer une flotte pour les explorer, car Albuquerque avait assez à faire dans l'Inde pour contenir les radjahs frémissants et les musulmans,les Maures, comme on disait alors, toujours prêts à secouer le joug. Cette expédition, sous le commandement de Diego Lopes Sequeira, fut, suivant la politique traditionnelle des Maures, tout d'abord amicalement reçue à Malacca. Puis, lorsque la méfiance de Lopes Sequeira eut été endormie par des protestations réitérées d'alliance, il vit se soulever contre lui toute la population et fut forcé de se rembarquer, non sans laisser, toutefois, entre les mains des Malais, une trentaine de ses compagnons.


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